Des faucons et des colombesL'administrateur Kuumaarke se hâta vers la salle de conférence, un pad sous le bras. Elle espérait que rien de grave ne se soit passé au cours de la matinée. Les conseillers de l'Alliance étaient observés avec curiosité et méfiance par les autres Lukari présents sur la planète. Elle priait pour que rien n'ait déraillé. Le Conseil planétaire lui avait donné la responsabilité de ces deux extraterrestres. Elle était après tout l'une des seules Lukari haut placée à avoir de l'expérience avec ce genre d'individus.
« Pardonnez-moi. J'avais une réunion. J'espère que l'on s'est bien occupé de vous », s'excusa-t-elle en entrant dans la pièce, tandis que la porte se fermait derrière elle avec un léger chuintement.
Les deux extraterrestres levèrent la tête. Le plus grand fronçait les sourcils, et elle avait appris à sa plus grande surprise que cette expression faciale avait presque la même signification pour elle que pour cet humain.
« Il n'y a pas de mal », dit l'humain, un homme du nom de Tom Paris. D'après ce qu'on lui avait dit, il tenait le rang de capitaine, et était un concepteur de vaisseaux ainsi qu'un explorateur accompli. « Je suis désolée si nous vous avons donné une mauvaise impression », s'excusa-t-elle.
Son compagnon, un Ferengi, hocha la tête. Il était bien plus amical que le cupide et belliqueux DaiMon Madran, le premier Ferengi à être entré en contact avec les Lukari. « Nous voulions juste nous entretenir avec vous au sujet de quelques petites choses. »
Le capitaine Nog jeta un coup d'œil à son ami humain puis reporta son attention vers Kuumaarke. « Nous avons remarqué des... incohérences dans les requêtes du Conseil planétaire. »
« Oh ! Eh bien, Je suis contente de l'entendre. Attendez... Vous avez dit, des incohérences ? Quelle sorte d'incohérences ? Peut-être que le traducteur universel a besoin de mon assistance ? »
Elle prit un siège à la table de conférence et s'assit en face des deux conseillers de l'Alliance.
« Eh bien, je ne suis pas certain qu'il s'agisse d'une erreur de traduction », dit Paris en affichant plusieurs rapports sur un écran situé à proximité. Il avait mis en rouge et en gras certaines requêtes. « Regardez plutôt, j'ai une requête demandant de conseiller vos ingénieurs pour rendre la coque de votre vaisseau plus résistante et une autre demandant de doubler les emplacements pour les armes. »
« Mais j'ai un autre rapport ici », dit le capitaine Nog, « qui nous demande de
réduire le nombre d'armes à deux afin d'installer davantage de capteurs sur les emplacements vides. Et dans ce rapport, on nous demande d'utiliser une configuration de réacteur à distorsion expérimentale à plus longue portée. »
« Ce qui nous va très bien, jusqu'à ce que vous lisiez
ce rapport, dans lequel les ingénieurs veulent que nous utilisions un plus gros moteur pour envoyer plus d'énergie aux boucliers et aux phaseurs », dit le capitaine Paris. Il posa ses mains sur la table. Nog et moi-même sommes ravis de jouer les conseillers pendant que vous construisez ce nouveau vaisseau, mais nous avons des versions différentes de ce que les Lukaris veulent
en faire. Avez-vous une idée ? »
Kuumaarke regarda les rapports et soupira. L'éternel débat. « Effectivement, le sujet est encore débattu. Je crois que toutes les personnes impliquées ont leur propre opinion, et que certaines sont... contradictoires. Je suis navrée de voir que le conseil n'a pas réussi à se mettre d'accord avant de vous donner des instructions. »
« Il y a un certain nombre de personnes qui pensent, après les événements qui se sont produits, que nous aurions besoin d'un vaisseau de guerre robuste », leur expliqua Kuumaarke. « Et au vu des récents conflits, je comprends pourquoi. Nous ne sommes pas vraiment dans une position avantageuse pour nous protéger. »
« J'imagine mal la Fédération vous laisser vous débrouiller tout seuls en cas d'agression militaire », dit Nog.
« Et pour être honnêtre, je pense que les Klingons et les Romuliens se joindraient également à vous - pour leur bien autant que pour le vôtre », renchérit Nog.
« Vous avez sans doute raison, Capitaine, mais cela nous rendrait dépendants d'un soutien extérieur dans une telle situation », dit Kuumaarke, d'un air désolé. « Ce qui dérange beaucoup de Lukari. D'aussi longtemps que l'on se souvienne, nous avons toujours été autosuffisants. L'aide dont nous avons déjà bénéficiée déplait d'ailleurs à une partie de la population. »
« Je respecte cette opinion », dit Tom.
« Et je la comprends », ajouta Nog. « Ferenginar a subit beaucoup de changements depuis que je suis né. Même aujourd'hui, tout le monde n'est pas ravi de voir nos femmes porter des vêtements et gérer des commerces. »
« Pardon ? »
Nog fit un geste de la main. « C'est culturel. Je vous expliquerai plus tard. Revenons plutôt à notre conversation. »
Kuumaarke secoua la tête et se dit qu'il fallait qu'elle étudie davantage les coutumes des Ferengi. Peut-être que les récents changements dans leurs mœurs pouvaient expliquer comment le capitaine Nog et le DaiMon Madran pouvaient appartenir à la même espèce. « Bien. Nous avons parlé de notre désir de protection, mais nous avons également une profonde envie de nous épanouir, et d'accroître notre connaissance de l'univers qui nous entoure. Elle afficha plusieurs documents relatant leurs recherches scientifiques. « Comme nous étions autosuffisants jusqu'à présent, nous n'avons jamais eu vraiment besoin d'explorer quoi que ce soit au-delà de notre planète. »
Elle pointa du doigt l'un des documents. « La communauté scientifique veut en savoir plus sur ce qu'il y a en dehors de chez nous, et elle veut le voir de ses propres yeux. Notre regard est resté rivé sur nous-mêmes depuis si longtemps que, maintenant que nous avons pu voir ce qui se trouve ailleurs, nous sommes terriblement impatients à l'idée d'en savoir davantage. »
Elle secoua la tête. « Je ne suis pas vraiment qualifiée pour vous servir d'agent de liaison. Je ne saurais vous dire comment répondre au Conseil planétaire. »
« Je ne suis pas d'accord », dit Paris, « Vous avez fait du bon travail, pour quelqu'un dont le monde a été chamboulé ».
« Merci. »
Elle soupira. « L'un d'entre vous a-t-il déjà eu à faire face à une telle situation ? »
« Sur Ferenginar, notre principale activité était la vente de contrats de protection à des mercenaires. Par le passé, quiconque voulait explorer l'espace le faisait dans le but de s'enrichir. Il s'agissait plus d'entrepreneurs indépendants que d'explorateurs », répondit Nog. Il regarda en direction de l'officier humain.
« La Terre a dû faire face à cela de nombreuses fois au cours de notre Histoire », dit Paris en hochant la tête. « Notre tout premier vaisseau longue distance, l'
Enterprise, fut l'objet d'un débat similaire. »
« L'
Enterprise ? N'est-ce pas le nom de votre vaisseau amiral ? »
« C'est exact, mais la Fédération a pour tradition de reprendre les noms des vaisseaux qui se sont distingués. C'est pourquoi l'actuel porteur du nom fait partie d'une longue lignée de vaisseaux du même nom. La tradition de l'
Enterprise remonte au temps où les hommes avaient encore à découvrir la Terre et se déplaçaient sur ses mers. »
« Oh ! C'est une merveilleuse tradition ! »
s'exclama Kuumaarke. « Peut être qu'une destinée similaire attend notre nouveau vaisseau. »
« Peut-être », s'esclaffa Paris, « mais certains désiraient que l'
Enterprise NX-01 soit voué à des fins plus offensives, et lourdement armé pour défendre notre planète. D'autres, au contraire, voulaient qu'il explore l'espace pacifiquement et aille à la rencontre de nos voisins en tant qu'ami et non en tant qu'agresseur. »
« On dirait que cela a fonctionné pour vous... non ? »
« Au final, oui », expliqua Paris. « Mais durant les premières années où le NX-01 fut mis en service, la terre fut attaquée. Il y eut des millions de morts. En conséquence de quoi... le débat reprit de plus belle. Cette fois-ci, une forte majorité était en faveur des armes et de la protection. »
« Mais Starfleet n'est-elle pas uniquement mandatée pour l'exploration ? La question n'aurait pas dû se poser, à ce moment-là. »
« Pas forcément », dit Nog, dont le ton semblait exprimer à Kuumaarke un sentiment de tristesse. « Starfleet a longtemps hésité entre adopter une posture encore plus défensive, et passer à l'offensive. Nous sortons à peine d'une guerre acharnée avec une race appelée les Iconiens. C'est la raison même pour laquelle l'Alliance existe désormais, mais nous avons également en notre possession de puissantes machines de guerre à présent. Et je dois avouer que je suis soulagé de voir que nous revenons à la science et à l'exploration... »
« Et à la rencontre de nos voisins ! »
intervint Tom.
« Et à la rencontre de nos voisins », acquiesça Nog d'un air amusé, « les appareils militaires ont leur place parmi nous et nos raisons de les avoir sont justifiées, également. »
« Regardez les Klingons, par exemple », dit Tom. « Leurs vaisseaux sont très militarisés, et c'est ce qui leur convient. Même au sein de la Fédération, les vaisseaux andoriens sont plutôt agressifs, tandis que les vaisseaux vulcains sont de véritables bastions de recherche scientifique pacifique. Nous possédons des vaisseaux hôpitaux, aussi bien que des transporteurs remplis de chasseurs. »
« Que devons-nous faire, alors ? »
demanda Kuumaarke « Il s'agit du seul vaisseau que nous construisons pour le moment. »
« Nous ne pouvons pas décider pour vous », dit Nog. « Nous ne sommes pas Lukari, donc nous ne pouvons pas savoir ce qui répondra le mieux à vos besoins. »
Le capitaine Paris sourit. « C'est en prenant ce type de décisions que vous trouverez votre voie. C'est ce que l'humanité a fait avec l'
Enterprise. Et c'est à votre tour maintenant. »
Kuumaarke regarda les documents d'un air pensif avant de tourner son regard vers les deux capitaines. « J'en parlerai au Conseil planétaire. Nous prendrons une décision. Et peut-être même que nous trouverons une autre voie. L'univers est un endroit dangereux, mais cela ne doit pas nous empêcher de l'explorer... prêts à toutes éventualités. »
Les deux hochèrent la tête. « Nous suivrons vos recommandations jusqu'à nouvel ordre », dit Nog. « Merci. »
Kuumaarke les salua alors qu'ils prenaient congé. Elle avait des lettres à rédiger.
Katherine Bankson
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Source :
Des faucons et des colombes