[TOUS] SporesPendu par les pieds, accroché à du mycélium extraterrestre dans une caverne souterraine n'était pas l'idée que se faisait le docteur Bashir de ses vacances de rêve, mais il restait philosophe sur sa situation. Cela ne servirait à rien de céder à la panique, même si l'ordinateur de sa tenue EV affichait que son intégrité était compromise et que des spores avaient réussi à entrer dans son système atmosphérique. Cela ne servirait à rien de céder à la panique à l'idée de ces spores extraterrestres s'insinuant dans son circuit d'air puis dans ses poumons. Cela ne servirait à rien de penser aux effets dévastateurs des spores elachis sur les divers espèces humanoïdes. Bien qu'ils n'étaient pas elachis, il s'agissait sûrement d'une espèce de la même famille, dont les effets devaient être tout autant nocifs.
Cela ne servirait à rien, alors il décida d'aborder la situation avec le plus de détachement possible.
« Bashir à
Aventine, appela-t-il sur son système de communication, la situation devient un peu plus pressante, ici. » Il espérait que sa voix transmettrait de l'amusement plutôt que de trahir son inquiétude.
Le voix du capitaine Ezri Dax lui répondit, claire et intelligible. « Ne crains rien, chéri. Nous allons te ramener ici dans... ». Il y eu une pause. “…Mon ingénieur en chef me dit dans trois minutes, alors essaye de prendre ton mal en patience.”
« Formidable, répondit le docteur. Si vous parvenez à raccourcir le temps de quelques secondes, je serai ravi de te préparer ce dessert que tu aimes tant ce soir. Je voulais dire, le cuisiner – pas avec un réplicateur. »
« Ahem », fit la voix sèche du capitaine lukari Kuumaarke, pour signaler sa présence sur la canal de communication. Son signal comportait quelques parasites. « Est-ce que votre proposition de dessert est valable pour quiconque vous secourra, docteur ? Si c'est le cas, je pense être en mesure de vous porter assistance avant l'
Aventine. » Malgré la morosité ambiante de la grotte brumeuse, sa voix lui semblait enjouée. « Pour ma part, j'aime assez les cupcakes au beurre de cacahuète. »
« Le premier arrivé sera le premier servi », répondit Bashir. Il étira le cou vers le bas – étant donné sa position – et la lampe de sa tenue éclaira l'abysse au-dessous. Il ne pouvait apercevoir que les légers mouvements de la brume. Cela ne pouvait être que la brume. Certainement pas un être vivant – il n'y avait que des champignons ici. Il prit une grande respiration, et fit de son mieux pour résister à la tentation de défaire les nœuds qui enserraient ses pieds dans le réseau de mycélium.
Quelques instants plus tard, son micro extérieur perçut les bruits que faisait Kuumaarke en escaladant les rochers. « Vous voila, docteur, dit-elle. Vous vous êtes bien empêtré ! »
« Le réseau de moisissures était tellement épais, qu'il était impossible de deviner que le sol était instable, répondit-il. Voulez-vous bien m'aider à remonter ? »
« Bien sûr », dit Kuumaarke. Elle s’approcha du bord du gouffre, puis commença à tirer sur les fibres. « Vous auriez pu simplement utiliser votre tricordeur », dit-elle moqueuse.
« Elle a raison, vous savez, commenta Ezri. Ils sont très pratiques quand il s'agit d'analyser son environnement. »
« Par pitié, ne vous liguez pas contre moi !, dit Bashir. Tout le monde aurait fait la même erreur. J'ai calibré le scanner sur le signal biologique du champignon, et non sur la géologie de la grotte. Je voulais simplement obtenir une analyse précise de l'un des nœuds principaux. »
Kuumaarke tira sur des fibres qui a leur tour rapprochèrent Bashir, mais il ne bougea pas d'un pouce. « Je ne suis pas sûre de pouvoir vous atteindre d'ici , dit-elle Mes chances d'obtenir le dessert de la victoire s'amenuisent. »
Ezri intervint à nouveau sur le canal de communication. « J'en ai bien peur, Kuu. Téléportation dans trois secondes. Je vous verrai tous les deux dans la Salle du téléporteur. »
Soudainement, le rhizome qui tenait la jambe de bashir se rompit, et il tomba.
« Que s'est-il passé ?! », cria Ezri dans le comm, au même instant Kuumaarke lâchait un cri perçant et tombait à la renverse. Bashir agita les bras vainement, laissant sortir un cri incompréhensible, s'arrêtant de façon abrupte au moment où il atterrit dans une flaque d'eau boueuse quinze mètres plus bas.
« Julian ? Julian !? cria Ezri. Salle du téléporteur, vous les avez verrouillés ? Signal bio- »
Bashir interrompit sa phrase en disant : « Je vais bien. De la boue a amorti ma chute. Elle...euh... s'est introduite dans ma tenue... je suis un peu mouillé. »
Ezri dit de manière laconique : « Assez perdu de temps, Salle du téléporteur. Ramenez-les. Maintenant. »
Bashir et Kuumaarke commencèrent à scintiller puis disparurent, pour réapparaître dans un halo de lumière à bord de l'
Aventine. Le membre d'équipage affairé aux commandes du téléporteur se mit à rougir tandis que Kuumaarke aidait Bashir à se relever. « Pardon, monsieur, dit-il nerveusement. Je n'ai jamais eu à téléporter une personne en mouvement auparavant, je n'arrivais pas à vous verrouiller jusqu'à ce que vous... ne touchiez le sol. »
Bashir se tint debout et fit un signe de la main au jeune homme pour le rassurer. « Ne vous inquiétez pas. Tout va bien, à part toute cette boue que j'ai apportée avec moi. Il défit le loquet son casque et se pencha en avant, faisant se déverser une fontaine d'eau boueuse du col de sa combinaison.
Kuumaarke elle-aussi enleva son casque. Le membre d'équipage se tenait nerveusement, ne sachant s'il devait quitter son poste, se balançant d'un pied à l'autre.
La porte de la Salle du téléporteur s'ouvrit avec un souffle pour laisser entrer Ezri au pas de course. Le jeune homme semblait un peu mal à l'aise en se mettant au garde à vous, mais le capitaine ne lui porta pas la moindre attention. Elle gravit immédiatement les marches de la plateforme de téléportation et inspecta le bras de Bashir.
« Julian, à quoi donc
pensais-tu ?, dit-elle sévèrement. Tu aurais pu te casser le cou en tombant. Ou te faire infecter lorsque la combinaison s'est percée. Il aurait pu t'arriver n'importe quoi. »
« Je sais, je sais, dit Bashir confus. Tu as raison. Je me suis laissé un petit peu.. emporter, c'est tout. La Mycologie n'est pas ma spécialité, mais j'ai découvert tellement de champignons étranges dernièrement – les Elachis, les Imaga megafungi, la Moisissure tri-nucléique – que je me suis surpris à les référencer en fonction de leurs similitudes ou de leurs disparités. »
Ezri pris Bashir par le bras gentiment et l'accompagna sur le pont. « Les docteur obsédés par les champignons n'ont pas des fins heureuses, le réprimanda-t-elle. Je me souviens d'avoir lu un article datant du 23e siècle écrit par... Stamen ? Stanton ? Je n'arrive plus à me souvenir. Il était convaincu qu'un champignon avait formé un gigantesque réseau multi-dimensionnel. Il avait dû en avaler un psychotrope, si tu veux mon avis. »
« Eh bien..., dit Bashir en réfléchissant. Les champignons peuvent former un réseau mycélien souterrain pouvant s'étendre sur des kilomètres. Et je ne te parle que des spécimens terrestres. Certains méga-champignons extraterrestres ont des colonies gigantesques pouvant faire la taille d'une planète. Et avec les Elachis, nous avons un champignon doté d'une forme de conscience ! Cependant, nous ne sommes pas en mesure de déterminer s'il s'agit d'une emprise de la conscience de l’hôte ou une conscience dormante qui se réveillerait dans le mycélium lorsqu'il infecte quelqu'un. »
Kuumaarke descendit après Bashir et dit : « Attendez, docteur. Vous ne voulez sûrement pas insinuer que ces champignons seraient une sorte... d’ordinateur ? »
« Non, pas exactement, dit Bashir, en retirant ses gants et en déversant davantage d'eau boueuse. Cependant, les nœuds isolés transmettent des informations génétiques et de matière organique à travers leurs réseaux. Et ils réagissent aux pressions évolutives à travers l'ensemble de l'organisme lié, en réponse au stimulus venant d'une autre zone. Et ils peuvent interagir avec un autre champignon isolé grâce à leurs spores, qui disposent généralement d'un grand nombre de mécanismes de dispersion. Donc, d'une certaine façon, ils le sont, oui. »
Kuumaarke secoua la tête après avoir retiré son casque et dit : « Donc, qu'est-ce que
cela veut dire ? »
Ezri répondit le plus naturellement possible : « Qu'il va avoir des champignons qui lui sortent du crâne si nous l'amenons pas à l'Infirmerie. Allez, docteur, à ton tour d'être le patient. »
« Tu sais bien qu'il n'y a pas pire patient qu'un docteur », dit-il avec un sourire.
« Pas la peine de me le rappeler », dit Ezri en levant les yeux. Les membres d'équipage de l'Aventine se pressaient hors du chemin de leur capitaine escortant le duo au Turbolift. « Un docteur brillant, mais un piètre patient. Un chercheur doué, incapable d'écouter un conseil. Un mari parfait, cependant. Enfin, d'habitude. » Elle lui sourit furtivement, puis lança : « À l'infirmerie ! »
Le Turbolift démarra dans un léger vrombissement avançant en douceur dans le vaisseau pendant que Bashir dégoulinait. Kuumaarke fit une remarque : « Vous pensez qu'ils sont tous liés ? Ces champignons, sont-ils connectés depuis... la préhistoire... grâce à leur extension dans l'espace ? »
Ezri semblait agacée, mais Bashir dit : « Ce n'est pas aussi absurde que ça en à l'air. On considère que beaucoup espèces humanoïdes sont liées entre elles grâce aux transplantations des Préservateurs. L'idée que d'autres espèces puissent être liées de manière similaire grâce à un organisme précurseur n'est pas si farfelue. »
« Intéressant, répondit Kuumaarke. Cela pourrait également expliquer pourquoi un si grand nombre espèces, comme les Hur’qs et les Tholiens ne correspondent pas au modèle humanoïde. »
« En effet, dit Julian avec un sourire. il se peut très bien que d'autres proto-espèces précurseurs aient répandu leur lignée à l'aube des temps. Une espèce reptilienne serait, peut-être, un précurseur des Sauriens et des Gorns. Une origine fongique pour les Elachis et beaucoup des autres espèces fongiformes, qu'elles soient intelligentes ou non à nos yeux. »
Et puis il y a les inconnus, ajouta Ezri. Les plus improbables qui défient toutes les catégories, comme les medusans. Peut-être qu'ils ont émergé d'une souche indépendante, tandis que les humanoïdes sont le résultat des cultures des Préservateurs ? »
« Une diversité infinie pour une infinité de combinaisons, répondit Julian. Des spores auraient les plus grandes difficultés à survivre à un voyage spatial ; même sans conscience, il n'est pas exclu que quelque chose, quelque part, soir parvenu à traverser le froid du vide spatial d'une planète à une autre. »
« D'accord, monsieur le poète, enlevez-moi cette combinaison, dit Ezri au moment où le groupe entrait dans l'infirmerie. Vraisemblablement, le champignon à atteint la tête. Tes élucubrations fantasmatiques deviennent plus élaborées. »
Bashir obtempéra en enlevant sa tenue, toujours dégoulinante d'eau poisseuse. Un des aide-soignants accouru à l'aide de Kuumaarke tandis qu'elle faisait de même avec sa tenue lukari. « Mais, sérieusement, dit Julian. Ce n'est pas du tout tiré par les cheveux. Imaginez les possibilités un instant. Des calculs effectués sur des distances immenses, instantanément. La possibilité de répondre immédiatement aux perturbations environnementales et aux stimulus. Les "actions à distance" que le vulcains effectuent grâce à la télépathie correspondent exactement à une réaction que l'on s'attendrait à voir chez un organisme mycélien doté de conscience. »
Ezri s'agenouilla pour aider Bashir à retirer ses bottes. Cet article de recherche de l'antiquité disait à peu près la même chose, mais vous penseriez que des progrès ont été effectués depuis ; que tous nos vaisseaux seraient équipés de systèmes de communication instantanée.
Bashir objecta en disant : « Eh bien, ce n'est pas parce que personne n'a réussi à comprendre
à l'époque, que l'on ne pourrait rien en faire
aujourd'hui. Après tout, la Transdistorsion n'existait pas à une époque. ou même simplement les voyages en distorsion. »
Kuumaarke finit de retirer sa combinaison et dit : « Mais, docteur, n'est-ce pas dangereux ? Les champignons n'ont-ils pas tendance à infecter les formes de vies comme les nôtres. »
« Il y a toujours une part de risque, admit Bashir aimablement. Mais il ne faut pas oublier la destination. Il existe un mécanisme de connexion biologique. Reliant les consciences à travers le temps et l'espace. C'est comparable à ces vieilles expériences chimiques du 21e siècle sur terre, essayant d'étudier comment nous percevons des notions comme "ici" et "maintenant". Le temps, l'espace, la conscience – encore aujourd'hui, nous comprenons à peine le cerveau humanoïde, mais peut-être qu'un cerveau non-humanoïde pourrait nous donner des indices sur les connexions. Et qui sait ce que nous pourrions découvrir ? »
Ezri se releva et se dirigea vers l'aide-soignant, qui entama un scan superficiel des signes vitaux de Bashir. Peut-être que tu trouveras quelque chose qui les lie tous. En attendant, après ton bain de boue forcé, tout ce que tu as à nous montrer mon cher mari, ce sont des chaussettes mouillées.
« Nous sommes issus de la boue, ma chère femme, dit Bashir en souriant, mais cela ne nous a pas empêché d'atteindre les étoiles. »
Jesse Heinig
Senior Game Designer
Star Trek Online
Source :
[PC] Spores